Le coloriage fait son come-back à l’école primaire
5 min. de lectureColorier, c’est mettre en couleurs, mais c’est aussi apprendre à maîtriser la tenue du crayon, à percevoir les surfaces, à marier les couleurs… et ça s’apprend à l’école.
Colorier, c’est mettre en couleurs, mais c’est aussi apprendre à maîtriser la tenue du crayon, à percevoir les surfaces, à marier les couleurs… et ça s’apprend à l’école !
Voici, quelques conseils d’une ancienne maîtresse d’école devenue rééducatrice de l’écriture.
Vous voulez réaliser un coloriage en nuances de gris, à partir de l’observation d’une photo en noir et blanc ? Prenez un crayon à papier un peu gras, plutôt 2B que HB : la trace sera bien couvrante.
Les enseignants de maternelle travaillent très souvent sur la perception des couleurs, que ce soit à partir d’albums tels que Le Magicien des couleurs et Trois souris peintres ou à partir de jeux et de chansons.
Je rêve de m’asperger de rouge
D’orange et de vert de jaune et de bleu
De toutes les couleurs de la terre
Je rêve, je rêve
chantait Louis Chedid dans l’inoubliable Emilie Jolie. Il interpellait l’héroïne :
Alors s’il te plaît veux-tu bien
Me mettre en couleurs…
À l’école primaire, nous sommes soucieux nous aussi de mettre le monde en couleurs. Nous voilà en train de distribuer aux enfants feutres, peinture et crayons. Seulement, comment s’y prendre pour que l’activité ait un vrai intérêt pédagogique ?
Bien souvent, le coloriage est proposé en autonomie, pour que les élèves soient actifs pendant que l’enseignant est sollicité ailleurs.
Pourtant, si on n’y prête pas attention, les enfants prennent vite de mauvaises habitudes graphiques. Il faut donc travailler la tenue de crayon et la mobilité des doigts avant de leur proposer de colorier seuls.
Quels supports ? Quels outils ? Quelle posture ?
On donne souvent aux jeunes enfants de grandes surfaces à colorier. Or, pour les remplir, ils sont obligés de mobiliser leur poignet.
Ils font donc un mouvement de « balayage » ou « d’essuie-glace », faisant pivoter le crayon autour de leur poignet. Dans ce grand geste, ils dépassent bien souvent les bords de la surface à colorier.
Pour leur permettre de remplir la surface plus rapidement, on leur met alors entre les mains de gros feutres, bien couvrants, qui ont souvent un corps épais en plus d’une pointe large. Erreur !
On voit ici que l’enfant a de bien trop petites mains pour pouvoir tenir correctement le gros feutre et qu’il le saisit donc comme un marteau ! Dans ces postures, il est évident qu’on ne peut pas exercer la mobilité de ses doigts.
Même si on leur fait poser les doigts correctement sur le feutre, le diamètre trop important fait glisser leurs doigts sur la mine.
Alors qu’avec un feutre ou un crayon moins gros, la mobilité des doigts est beaucoup plus facilement assurée.
Si on veut faire colorier de grandes surfaces, il est donc plus pertinent d’utiliser de la peinture, sur un plan vertical ou incliné. Dans cette configuration, le mouvement part de l’épaule et les doigts ne sont pas mobilisés, ce qui est normal.
Sur feuille, il faut plutôt privilégier le coloriage de petites surfaces, avec des outils de taille adaptée à la main de l’enfant.
Afin que l’enfant soit bien installé, il faut l’aider à :
- tenir le crayon avec le pouce, en appui sur le côté de la dernière phalange du majeur, tandis que l’index repose sur le crayon
- positionner sa main en-dessous de la surface à colorier, sans casser le poignet, en gardant donc le crayon bien dans l’axe du coude
- bouger les doigts et garder le poignet immobile. Au début, on peut poser ses propres doigts sur le poignet de l’enfant pour qu’il le laisse au repos.
Une fois l’enfant bien installé, on lui propose de remplir la surface soit en la délimitant avant de la remplir avec des petits mouvements circulaires, soit en bougeant le pouce dans le sens de la forme à remplir.
On voit bien comment l’activité de coloriage aide les enfants à dissocier le mouvement de leur pouce de celui de leur poignet.
Varier les effets
Avec le coloriage, on peut travailler de multiples effets et varier les consignes afin de renouveler l’intérêt pour l’activité et de lui donner toute sa place au sein des techniques graphiques et plastiques.
Je vous propose quelques consignes possibles à donner en coloriage, en fonction du niveau de classe et de la maturité des élèves.
Colorie ce mandala en plusieurs nuances avec un seul crayon de couleur, en variant la pression.
Les objectifs sont :
- apprendre à maîtriser la pression sur le crayon
- réaliser une composition régulière et harmonieuse
Réalise une frise sur ton cahier en utilisant plusieurs couleurs.
Les objectifs sont :
- prendre des repères dans l’espace du cahier
- s’entraîner à reprendre la bonne posture à chaque changement de crayon
- réaliser une composition régulière et harmonieuse
Fais un dessin en coloriant les surfaces de manière à utiliser tout l’espace de la feuille.
Les objectifs sont :
- exprimer sa créativité en créant une composition
- utiliser l’espace de la feuille
- choisir les couleurs de manière harmonieuse
Colorie ton dessin de sciences en utilisant des couleurs réalistes.
Les objectifs sont :
- réaliser un dessin d’observation et le mettre en couleurs
- respecter les proportions et les différents éléments
- colorier de manière uniforme et légère
Mélange deux couleurs pour obtenir une nouvelle couleur.
Les objectifs sont :
- connaître les couleurs primaires et secondaires
- apprendre à maîtriser la pression sur le crayon
- créer un effet visuel artistique
Pour d’autres idées de séances de coloriage, les techniques d’artistes sont une source d’inspiration inépuisable.
Une ouverture aux univers colorés des artistes
Le soleil levant a été réalisé à partir de l’observation du tableau de Claude Monet. Cette consigne permet d’évoquer l’impressionnisme.
Bien d’autres peintres de diverses époques et courants peuvent être invités à partager leurs couleurs en classe !
Aplats de couleurs simples, mélanges, effets de pression, juxtapositions, nuances, effets de transparence… Chaque séance technique de coloriage peut être amenée par la découverte de l’univers d’un peintre, ou au contraire être prolongée par la découverte de tableaux utilisant cette technique.
À partir de la variété extrême de ces œuvres, on pourra montrer :
- que la mise en couleur peut aussi bien avoir lieu avec des nuances de blanc qu’avec des couleurs vives
- que certains personnages peuvent être mis en valeur par des aplats de couleur contrastant avec le reste du tableau
- que les couleurs peuvent devenir elles-mêmes le sujet de la toile
- que les traits ou les points de peinture peuvent être la base d’effets visuels…
Chers enseignants, à vos crayons !
Crédits photo : Laurence – Pixabay – Wikimedia Commons