L'Arctique canadien

2. Les explorations

L’Arctique canadien inspire et fascine. La région est connue depuis l’Antiquité mais le climat polaire rend le voyage très compliqué. À la fin du 15ème siècle, l’essor du commerce donne envie de se lancer aux navigateurs ! Les premiers explorateurs tentent l’expédition vers l’Arctique à la recherche du passage du Nord-Ouest. Ils essaient de contourner l’Amérique du Nord afin de se rendre plus rapidement vers l’Orient.

 

500 ans avant Christophe Colomb

 

Dès l’an 1 000, les Vikings ont colonisé l’Arctique. Eric le Rouge a fondé la première colonie européenne au Groenland. Son fils, Leif Erikson, serait le premier européen à découvrir l’Amérique du nord continental. Il a établi une colonie à Vinland, aux alentours du Labrador et de Terre-Neuve.

Portrait d’Erik le Rouge tiré de la Gronlandia d’Arngrímur Jónsson (1688). Licence libre de droit – Wikipédia

Le savais-tu ? Eric le Rouge s’appelait en réalité Eirikr Thorvaldson. Il a été surnommé ainsi en raison de la couleur rousse de ses cheveux et de sa barbe.

 

Les premiers explorateurs

 

Plusieurs grands explorateurs partent en quête du passage, comme Martin Frobisher ou John Davis. Les expéditions durent souvent plus d’un an ! Il faut assurer la survie de l’équipage et charger les navires de tonnes de provisions et matériel.

 

Plusieurs explorateurs perdent malheureusement la vie au cours de ces voyages. Mais les expéditions ne sont pas vaines pour autant ! Au fil des voyages, les connaissances sur l’Arctique canadien s’étendent. Les expéditions permettent de découvrir l’archipel ainsi que la richesse de sa faune et de sa flore.

 

L’expédition Fram

 

Fridtjof Nansen (1861-1930) fait partie des grands explorateurs de l’Arctique. En 1893, il décide d’atteindre le Pôle Nord en se laissant dériver par les courants marins. Il embarque à bord d’un nouveau navire, nommé « Fram », ce qui signifie « en avant” en Norvégien.

Portrait Henry van der Weyde (George Grantham Bain Collection – Library of Congress), Public domain, via Wikimedia Commons

Fridtjof Nansen et son équipage voguent de longs mois. Finalement, Fridtjof Nansen décide de continuer la route sur la banquise. Il tente de se rapprocher du Pôle Nord en chien de traîneau et à ski.

 

Le navigateur réalise un exploit ! Il est le premier explorateur à atteindre le point le plus au nord à cette époque. Lorsqu’il rentre en Norvège, il est accueilli en héros. Ses observations des courants marins apportent des connaissances très importantes.

 

Un tout nouveau bateau

Le Fram en Antarctique lors de l’expédition Amundsen. From Amundsen, Roald: The South Pole, Vol. I, first published by John Murray, London 1912. Photo facing page 170 – Wikipédia domaine public

Pour préparer l’expédition, Fridtjof Nansen demande à l’architecte Colin Archer d’imaginer un nouveau bateau. Pour naviguer dans les eaux de l’Arctique, le navire doit résister à la pression de la glace. L’architecte dessine un bateau large mais court. La coque du bateau est arrondie pour ne pas s’accrocher dans la banquise. Les murailles du bateau sont renforcées pour préserver la chaleur. Elles sont isolées avec plusieurs couches de feutre, liège, sapin et bois.

 

Le savais-tu ? Il faudra attendre 1906 pour que le navigateur norvégien, Roald Amundsen traverse pour la première fois le passage de l’est à l’ouest.

 

L’expédition Franklin.

 

Plusieurs expéditions ont marqué l’Histoire. Parmi elles, l’expédition Franklin. Disparue en 1870, elle n’a été retrouvée que 170 ans plus tard !

 

L’expédition Franklin est une expédition polaire britannique. Elle a été menée au 19ème siècle par le capitaine John Franklin. Son objectif était de réussir la première traversée du passage du Nord-Ouest afin d’explorer l’Arctique.

 

En 1845, deux bateaux partent d’Angleterre : l’Erebus et le Terror. À leur bord, un équipage de 128 marins, du matériel et des provisions. Mais, après avoir traversé l’Atlantique et rejoint le Groenland, l’expédition disparaît dans l’archipel Arctique canadien…

 

Que s’est-il passé ?

 

Pendant l’hiver 1846, les bateaux se retrouvent piégés par la banquise. En 1848, les marins toujours en vie décident d’abandonner les navires. Ils tentent de chercher de l’aide à pied en avançant sur la banquise. La femme de Franklin demande qu’une équipe de sauvetage soit envoyée pour sauver son mari et les marins.

 

Les secours se rendent dans l’Arctique mais ne trouvent pas l’équipage. Les recherches s’arrêtent en 1849. Ce n’est qu’en 2014 que l’Erebus est localisé dans les eaux au sud de l’île du Roi-Guillaume. Le Terror est retrouvé en 2016.

 

Le travail d’historien

 

On sait aujourd’hui que les marins ont eu des contacts avec les peuples autochtones. Louie Kamookak est un historien inuit. Il a huit ans lorsque ses grands-parents lui racontent l’expédition Franklin. Cette histoire fait partie de la tradition orale inuite. Elle se raconte de génération en génération. Devenu adulte, Louie Kamookak collecte les informations des inuits. Grâce à son travail, les archéologues sous-marins de Parcs Canada découvrent un premier bateau en 2014 !

 

Explorer les airs

 

Après l’océan, les explorateurs partent à la découverte de l’Arctique canadien par les airs !

 

Salomon August Andrée est un ingénieur suédois, passionné de montgolfières. Il propose d’atteindre le pôle Nord en utilisant un ballon à gaz. En 1897, l’équipage composé d’André et deux autres explorateurs s’envole. Dans le ballon, l’équipage emporte des provisions, des vêtements, des fusils et même des traîneaux !

 

Le 14 juillet 1897, après 33 heures de vol, le ballon atterrit à 750 kilomètres du pôle Nord en raison du vent ! L’équipage tente de rejoindre à pied le cap Flora, dans l’archipel François-Joseph. Arrivés dans l’Arctique, les explorateurs chassent pour survivre. Inadaptés à l’Arctique, ils décèdent à la suite d’une maladie causée par la viande. Le dernier signe de vie des explorateurs date du 17 octobre 1897.

 

L’expédition est aujourd’hui une légende en Suède. Salomon August Andrée a détaillé le voyage dans un carnet. Ses écrits permettent de retracer le parcours de cette exploration. C’est un document précieux pour les historiens.

 

Le savais-tu ? En 1926, Umberto Nobile devient le premier pilote à survoler le pôle Nord. Après quatre jours de vol à bord du ballon dirigeable “Norge”, l’équipage arrive sur le détroit de Béring.

 

Se rendre en Arctique au 21e siècle

 

Qui peut se rendre en Arctique ? Tout le monde ! À condition d’être bien équipé et bien accompagné. On peut rencontrer en Arctique des scientifiques, des grands voyageurs et des touristes. Il est possible de s’y rendre en avion ou en bateau.

 

Le brise-glace

 

Il n’y a pas que les êtres humains qui doivent s’adapter aux conditions extrêmes de l’Arctique ! Le matériel doit être robuste.

 

Pour naviguer à travers la banquise, parfois très épaisse, il est nécessaire d’utiliser un bateau spécial : le brise-glace. Il s’agit d’un navire adapté aux conditions extrêmes. Son rôle est de couper la glace afin de libérer le passage. Il permet aux bateaux commerciaux, aux bateaux de secours et aux expéditions scientifiques de circuler à travers l’Arctique.

Le brise-glace glisse au-dessus de la banquise et l’écrase avec son poids. Rémy Marion – Pôles d’Images

Le bateau doit être lourd et puissant. Il est efficace grâce à sa proue (avant d’un navire). Sa coque épaisse le protège de la glace. La coque du navire va se glisser au-dessus sur la glace et la casser avec son poids. De puissants moteurs permettent de pousser le bateau sur la glace et de faire marche arrière pour prendre de l’élan.

Un brise-glace dans l’Arctique. Rémy Marion – Pôles d’Images

Le savais-tu ? Le premier brise-glace équipé d’une machine à vapeur s’appelait le Pilot. Il a été construit en Russie en 1870.

 

Rencontre avec Anne Quérémé, navigatrice au 21ème siècle

Anne Quérémé en 2018 dans le passage du Nord-Ouest.

Anne Quérémé est navigatrice et voyageuse de l’extrême. Elle est aussi conférencière et autrice. Passionnée de voile depuis l’enfance, elle a tenté à trois reprises de franchir le passage du Nord-Ouest dans l’Arctique canadien.

 

Comment a commencé votre passion pour le voyage ?

 

Mon père était moniteur de voile à l’école des Glénans. Le vendredi soir, on échangeait nos cartables pour nos sacs de mer et on partait jusqu’au dimanche soir. On était toujours en mer. Il y avait un espace de liberté qui me plaisait beaucoup. Ça m’a permis de développer mon imagination et de nourrir mes voyages.

 

Comment prépare-t-on une expédition en Arctique ?

 

Lors de mes voyages, la sécurité prime. Il faut d’abord faire corps avec le bateau, être parfaitement à l’aise avec lui. Il faut se préparer physiquement, avec un programme de renforcement musculaire au niveau du dos, des bras et des jambes. La préparation mentale est aussi importante. Il faut accepter la solitude comme un cadeau et apprendre à cohabiter avec soi.

 

À quoi ressemble la vie sur un bateau ?

 

Un kayak, c’est petit. Il faut emmener l’essentiel, c’est-à-dire son matériel. Tout est calculé au poids prêt, car tout ce qu’on va transporter pèse assez lourd. Plus on sera lourd, moins vite on avancera. En Arctique, je pars avec une combinaison étanche pour me protéger de l’eau glacée en cas de chute. J’emmène de la nourriture lyophilisée, ce sont des aliments en sachet auxquels on ajoute de l’eau. Il faut emmener un dessalinisateur pour boire, manger et faire sa toilette. Comme je suis une fan de chocolat, j’emporte des tablettes. C’est important de se faire plaisir pour garder de l’enthousiasme et de l’énergie ! On vit avec uniquement ce dont on a besoin.

 

Quel souvenir gardez-vous de la première fois que vous avez vu la banquise ?

 

La première fois que j’ai vu la banquise, c’était en 2010. C’était magique, je réalisais un rêve d’enfant. Avec l’équipe, nous campions sur des plaques de banquise. Il y a aussi des icebergs monumentaux. Lorsqu’ils dérivent, ils sont en file, comme dans un embouteillage. On s’est amusé à surfer sur les vagues que créaient les icebergs lors de leur chute.

 

Avez-vous rencontré des animaux ?

 

Le Nord-Ouest canadien est un lieu où les bélugas viennent donner naissance à leurs petits. Des petites baleines blanches sont venues frôler mon kayak en chantant. Il y en avait des centaines. Je me suis arrêtée de pagayer pour les regarder, c’était irréel. En 2015, avec mon binôme, nous avons rencontré un ours polaire. C’est certainement ma plus belle rencontre en Arctique.

 

Comment s’est passée votre rencontre avec les Inuits ?

 

Lorsque je suis arrivée à Tuktoyaktuk, ils étaient en train de restaurer l’église. Je leur ai donné un coup de main. C’est comme ça que nous avons créé des liens. J’ai commencé à apprendre la langue inuit. Si on veut se lier avec les gens, il faut faire l’effort d’aller vers eux, de se plier à leur culture et traditions. Apprendre quelques mots, comme « bonjour », « merci », « au-revoir » et « s’il vous plaît ».

 

Quelles leçons tirez-vous de ces voyages ?

 

Aller voir ailleurs, nous ouvre à d’autres cultures, d’autres paysages. Le voyage est à la portée de tout le monde, c’est avant tout de la curiosité.

 

Lexique

 

Historien : personne qui analyse les faits du passé.

Altitude : l’altitude représente l’élévation, c’est-à-dire la hauteur. Elle se calcule par rapport au niveau de la mer.

Provisions : ensemble de choses utiles (nourriture, matériel de secours…).

Robuste : fort, résistant, solide.

Proue : avant d’un navire.
Kayak : petite embarcation qui avance à l’aide de pagaies.
Pagaie : petite rame qui permet de manœuvrer sur l’eau.
Lyophilisé : se dit d’un aliment qui se présente sous forme déshydratée, c’est-à-dire sans eau.
Dessalinisateur : appareil qui permet d’enlever le sel de l’eau et de la rendre potable.

 

Sources

 

Recherches encyclopédiques : https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/exploration

 

https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/brise-glace

 

Article de Futura Sciences : https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/epoque-moderne-podcast-baie-terreur-sort-tragique-arctique-81351/

 

Entretien avec Anne Quérémé, navigatrice : https://www.annequemere.com/